José Garcia, un rescapé du coronavirus pas comme les autres.

Jérôme Salomon, le directeur de la santé, tous les soirs à la télévision aux alentours de 19H30 égrainent de manière quasi mécanique les chiffres du coronavirus : 26 3380 morts, 253 nouvelles admissions, 2.776 malades atteints d'une forme grave de Covid-19 sont hospitalisés en réanimation…notre cœur se tend. Mais que cachent ces statistiques des nouveaux départements rouges et verts ? Ces statistiques ne nous expliquent pas les parcours de maladie anonymisés par le point quotidien. Elles évitent d’ajouter à l’angoisse. Elles évitent d’augmenter les peurs. Elles se font pudiques ces foutues statistiques. Nous, les supports écrits, allons alors au-devant des peurs des français et vous livrons les quelques précieux témoignages des rescapés du coronavirus. ActiveDomicile, plateforme innovante d’aide à domicile, a eu l’honneur de recueillir les mots de monsieur Garcia, ce pilier d’une famille de Valence, aujourd’hui transformé en un homme encore tout à fleur de peau.

Traumatisé. Choqué. Fragilisé. Perturbé. Encore effrayé. Monsieur Garcia a 75 ans. Il a ô combien changé à la sortie de l’épreuve tant redoutée par chaque membre de la communauté mondiale. Il fait partie des 56 217 malades guéris. Ceux pour qui le personnel soignant trouve encore le temps de dresser une haie d’honneur à la sortie de l’hôpital pour les féliciter et pour se réconforter des heures, des jours, des nuits passés auprès d’eux avant de revenir au chevet des autres ; ceux encore branchés aux nombreux respirateurs artificiels qui ont squatté du jour au lendemain les services de réanimation des hôpitaux.

« Mon amie la Plume », cette initiative solidaire proposée par Active domicile permet aux adultes et aux enfants de correspondre avec des personnes âgées, les Majors comme nous les appelons. Pourquoi les Majors car cela fait référence à la plume Sergent Major que nos ainés utilisaient pour s’entrainer à l’écriture avec les pleins et les déliés. Aujourd’hui, mon amie la Plume souhaite rendre hommage à tous les rescapés du virus qui a durablement transformé nos vies à tous. « Mon amie la Plume » espère favoriser les relations intergénérationnelles, lutter contre l’isolement mais par-dessus-tout Active Domicile souhaite préserver la mémoire collective, patrimoine essentiel de notre société. En écrivant aux plus jeunes, les Majors pourront faire part de leurs souvenirs et partageront des moments de vie uniques. Lisez l’histoire de monsieur Garcia et écrivez-lui à votre tour. Son prénom : José.

Ce beau monsieur d’1m67 originaire de Malaga en Espagne a grandi au Maroc avant d’émigrer en France. À Tanger, plus précisément où il a étudié à l’école Saint-Michel, la même que Jean-Luc Mélenchon mais à une époque différente. Il en garde l’amour du Maroc. Ses odeurs, ses sonorités lui manquent. Il se sent proche des marocains tout comme des marocaines à l’instar de cette infirmière qui s’est penchée à son chevet durant son hospitalisation. Elles étaient nombreuses à s’en occuper de monsieur Garcia. Celle-ci et quelques autres. Il en garde un souvenir encore ému. C’est qu’il pleure José Garcia. Il pleure beaucoup. Quasi à chaque passage de son interview et ce dès les premières secondes. Être interviewé à 75 ans. Bon sang de bonsoir. Qui l’aurait prédit ? Pas lui. Déjà malade et bien mal en point en ce sacré samedi où il fut amené aux urgences de l’hôpital de Valence par ses filles et sa femme Monique.

Une semaine avant, il était déjà bien fébrile. Son corps était parcouru de frissons. Pas les frissons de la grippe. Des frissons bien plus importants. De gros frissons. Plus ou moins de frissons selon les jours. À cela s’ajoutaient les diarrhées carabinées et les vomissements : cinq fois par jour en moyenne. De ces vomissements qui déchirent le ventre quand il est vide car José ne mangeait plus. Plus du tout d’appétit. À peine quelques verres d’eau. Et malgré cela, il n’a pas pensé à aller à l’hôpital. Son médecin traitant n’était pas là. Christelle, très préoccupée par l’état de santé de son père, prit finalement rendez-vous chez un autre docteur, le docteur Laurent. Le médecin a très vite compris. Il a donc pris le temps de l’ausculter en profondeur et l’envoya effectuer une radiologie des poumons. Tout de suite après, épuisé par la visite médicale, le couple entra à la maison. Ses filles, toujours aussi inquiètes, appelèrent pour prendre des nouvelles. Elles et leur mère ont pris alors illico la décision de le ramener aux urgences.

José Garcia à qui l’on demande son sentiment nous avoue entre pleurs difficilement retenus et pudeur que déjà la peur l’étreignait. Allait-il revoir sa femme et ses filles. Il n’en était déjà plus bien sûr. Et cette douleur. Quel traumatisme ! Le souvenir de la douleur est encore si présent. Elle le hante encore. Il a peur. Peur de retomber malade. « Et si le virus m’attrapait à nouveau. » Rien ne sert de le rassurer et de lui expliquer que les dernières nouvelles sont tout à fait rassurantes à ce sujet. « Vous êtes immunisé, lui dit-on. Ça n’était qu’une rumeur que l’être humain même après avoir contracté la maladie n’était pas immunisé. Nous sommes bien immunisés. » Le soulagement ne l’atteint même pas. Le souvenir qui le fait le plus frémir est encore bien vivace est cette sensation de suffoquement. Les infirmières lui faisaient la conversation pour ne pas qu’il tombe dans la plus profonde des déprimes. Il essayait tout naturellement de leur répondre. Très difficile. « Dès que je parlais, je m’étouffais. » Malgré la présence bienveillante, toutes les heures, de tout le personnel hospitalier qui surveillait ses constantes et son niveau d’oxygène, il se sentait seul dans sa chambre. Une chance qu’il eût son téléphone pour être appelé par sa famille une fois par jour et ainsi rompre l’isolement et les angoisses tenaces de mourir emporté par le virus foudroyant. Aux infirmières qui prenaient chacune le temps de beaucoup le rassurer, il racontait quand il le pouvait ses escapades en Argentine. Elles brisaient le quotidien des soins par des blagues. Et elles devaient aller puiser elles-mêmes dans leur force pour garder le contact avec leurs nombreux patients.

José parmi les plus chanceux et malgré son diabète pour lequel il reçoit quatre piqures quotidiennes d’insuline à domicile a subi quinze jours d’hospitalisation. Le coronavirus a tout déréglé. Il n’a pas encore reçu le bilan de son hospitalisation et se demande encore quel est le traitement qu’il l’a guéri. Hydroquinone et antibiotique ou un autre traitement expérimental. Il n’en a aucune idée. Ce qu’il sait et dit c’est qu’il n’a pas récupéré de ses forces. Il est encore très affaibli. Quand l’ambulancier l’a enfin ramené à la maison, il ne tenait pas en équilibre. Avant, il était en pleine forme. Il bricolait et jardinait. Son poumon est très abimé. Il doit passer prochainement deux examens, des scanners.

« Cette saloperie de maladie, elle marque » s’exclame dans un sanglot celui qui a survécu auparavant sans faillir aux plus dures épreuves. « Quand la télévision s’allume, on ne voit qu’elle. On ne parle que d’elle et de ses morts. » Alors Monique, sa femme l’éteint. Il finit par rendre un hommage soutenu au docteur Paolus, « une docteure magnifique qui me soutenait et me consolait ». Ses tout derniers mots sont pour sa chère famille qui l’appelle tout le temps et sa femme.

Voilà les mots que j’ai recueillis pour vous d’un rescapé du coronavirus. Mon vœu de la fin si comme les enfants et les adultes de Mon amie la Plume j’avais une lampe magique et un vœu à formuler :

« Cher monsieur Garcia,

Si j’avais une lampe magique, je souhaiterais que vous recouvriez toutes vos forces et que vos larmes qui fleurissent à l’œil deviennent larmes d’espoir pour qu’on vous vaccine et que vous mettiez de côté tous vos tourments. »

Chères lectrices, chers lecteurs, si vous aussi, vous voulez écrire à monsieur José Garcia ou lui envoyez un dessin ou un vocal, Mon amie la plume lui fera parvenir. Vous pouvez prendre contact avec lui par mail à : contact@activedomicile.fr ou à ActiveDomicile, 105 rue des Mourettes 26000 Valence.